Accueil Culture Centenaire de la mort d’Albert Ier, un « chef d’Etat à part » dans l’histoire de Monaco

Découverte de nouveaux territoires, développement de la Principauté, diplomatie… le Prince Albert Ier a laissé beaucoup de traces dans l’Histoire et sur le Rocher. Retour sur sa vie et son œuvre.

Albert Ier est né à Paris, le 13 novembre 1848. Il est l’unique enfant de Charles III et d’Antoinette de Merode. Une naissance qui intervient pendant une période trouble de l’histoire monégasque. Quelques mois plus tôt, les villes de Menton et de Roquebrune, qui faisaient alors partie de Monaco, se déclarent libres et se détachent de la principauté.

Monaco, qui s’étendait alors sur 24,5 kilomètres carrés, en perd plus de 23. Et sa population passe de 7.000 habitants à 1.250, selon ce document publié par le département des Alpes-Maritimes.

Albert, lui, grandit loin de la Côte d’Azur, entre Paris et le château de Marchais (Aisne). En 1858, alors qu’il a tout juste dix ans, le futur souverain pose la première pierre du casino de Monte-Carlo.

« On lui tend une première pierre, une truelle en argent, un petit peu de mortier et il va tartiner la pierre. Tout le monde va applaudir, en extase, d’après les journaux de l’époque », raconte Guillaume Rose, ancien directeur de la communication de la Société des Bains de Mer, dans l’émission Secrets d’histoire.

Les jeux d’argents n’existant qu’à Paris et étant interdits en Italie, la Principauté prend les paris de devenir une capitale du Jeu. Monte-Carlo se construit, attirant de nombreux travailleurs, notamment des émigrés italiens, qui s’installent à la frontière monégasque.

De la terre à la mer

Albert vit une jeunesse « orageuse ». « Il sort du système scolaire sans diplôme », explique Thomas Fouilleron, le directeur des archives et de la bibliothèque du Palais princier.

C’est un adolescent ‘ingouvernable’, il le dit lui-même !

Thomas Fouilleron

À l’adolescence, il perd sa mère, Antoinette de Merode, des suites d’une longue maladie. « Il prend alors ‘la terre en détestation’, dit sa grand-mère », poursuit Thomas Fouilleron. « Il veut changer d’horizon. »

Albert se tourne vers la mer, reçoit quelques rudiments de navigation de la part d’un officier de la marine française et part dans la marine espagnole de 1866 à 1868. Un an plus tard, « son père demande à Napoléon III de le prendre dans la marine impériale française et il fera la guerre de 1870 », continue le directeur des archives du Palais princier.

En 1873, il achète son premier navire et, à partir de 1885, l’utilise pour démarrer ses campagnes océanographiques.

À la découverte de l’océan arctique

Pendant 30 ans, jusqu’en 1915, le prince Albert Ier parcourt les mers du globe, à bord de quatre navires. « C’était un aventurier extraordinaire », décrit son arrière-arrière-petit-fils, SAS le Prince Albert II de Monaco, à France3 Côte d’Azur.

Il a fait quelque 28 expéditions à travers le monde, surtout en Méditerranée, dans l’océan Atlantique et dans la sphère arctique.

SAS le Prince Albert II

« C’est un faux méditerranéen, il n’aime pas trop la chaleur », précise Thomas Fouilleron. Il organise ainsi quatre expéditions (1898, 1899, 1906 et 1907) dans la région du Svalbard (Norvège), et notamment l’île de Spitzberg, à quelques centaines de kilomètres du pôle nord.

À bord du navire « Princesse Alice II » (du nom de sa seconde épouse), il embarque avec lui une soixantaine de personnes (scientifiques, matelots, cuisiniers…). « Il est certes sur des navires qu’il a fait construire, de beaux navires solides avec une coque en acier », raconte Robert Calcagno, directeur général de l’Institut océanographique, dans l’émission Secrets d’histoire. « Mais ils n’ont rien du tout d’un brise-glace ! »

Objectifs : cartographier cette partie du globe quasiment inexplorée à l’époque et analyser la faune et la flore présentes sur place.

« Ces explorations du Svalbard sont très importantes pour la Norvège », affirme Geir O. Klover, le directeur du Fram Museum d’Oslo, à Monaco Info. « Elles font partie des premières expéditions scientifiques impliquant des scientifiques norvégiens. »

Le groupe était mené par un Norvégien, Gunnar Isachsen […]. On peut [les] considérer comme étant à cette époque les plus éminents scientifiques des régions polaires et ce, pendant les trente années qui ont suivi.

Geir O. Klover

Albert Ier emporte avec lui de quoi photographier et filmer. Des documents qu’il présente ensuite lors de conférences publiques.

Diplomatie franco-allemande

« Le Prince Albert Ier était un visionnaire, un homme d’une culture extraordinaire, d’un esprit curieux de toutes les sciences », détaille SAS le Prince Albert II de Monaco.

C’était aussi un humaniste, un pacifiste.

SAS le Prince Albert II

Thomas Fouilleron donne notamment deux exemples. D’abord la recherche d’une diplomatie et de relations entre la France et l’Allemagne. « Entre 1898 et 1914, il effectue une dizaine de visites à Kiel à la rencontre du Kaiser [l’empereur allemand, ndlr] et en compagnie de personnalités françaises pour évoquer et avancer sur des dossiers qui fâchent. »

En 1902, lors d’un congrès international de la paix à Monaco, il demande à Guillaume II, le Kaiser, de dessiner un drapeau de la paix. Mais ce drapeau ne verra jamais le jour.

Thomas Fouilleron

Autre exemple : son opposition à l’antisémitisme. Au moment de l’affaire Dreyfus, il souhaite publier dans les journaux cette lettre ouverte. Avant d’y renoncer car « le Prince est un souverain étranger », poursuit Thomas Fouilleron.

Première page de la lettre ouverte à Flore Singer, qui soutient le capitaine Dreyfus, que le prince Albert Ier voulait publier dans la presse au début de l’année 1898. • © Archives du Palais Princier de Monaco/Loic Repiquet

Un an et demi plus tard, Albert Ier publie finalement une autre lettre à Lucie Dreyfus dans Le Figaro.

« Un chef d’Etat à part »

À Monaco, Albert Ier a laissé de nombreuses traces de son règne : le Musée océanographique (inauguré le 29 mars 1910), un lycée -qui porte son nom- sur le Rocher, un hôpital (aujourd’hui le CHPG), la première constitution de la Principauté en 1911, la Sûreté publique (qui fête cette année ses 120 ans)…

Il développe également les rendez-vous sportifs aristocratiques et permet notamment la tenue du premier rallye automobile.

C’était avant tout quelqu’un qui croyait beaucoup en l’Homme, en un progrès raisonné. Il parlait déjà à son époque d’excès dans la façon de consommer, de pêcher et de la nécessité de protéger certains espèces.

SAS le Prince Albert II

« Tout cela fait que c’est un chef d’Etat à part dans l’histoire de la principauté », assure l’actuel souverain de Monaco à propos de son trisaïeul.

Commémorations en Norvège et à Monaco

Pour commémorer le centenaire du décès d’Albert Ier, le 26 juin 1922, le chef d’Etat monégasque est parti en Norvège. Au programme notamment : une croisière de quelques jours « pour faire le tour du Spitzberg, visiter les lieux qu’il avait lui-même visités et les faire voir à ma famille et surtout mes enfants ».

À Monaco, plusieurs événements sont prévus pour ce centenaire, répertoriés sur le site Internet du Comité de commémoration Albert Ier-2022. Au programme notamment : une ciné-conférence dans la cour du Palais princier sur « Les mondes d’Albert Ier, journal d’une vie », organisée par l’Institut audiovisuel de Monaco le 9 juillet prochain.


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