Accueil Palais Retrait de Philippe Mettoux : les dessous d’un renoncement inattendu

Retrait de Philippe Mettoux : les dessous d’un renoncement inattendu

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Le 26 juin 2025, Philippe Mettoux a officiellement annoncé son renoncement au poste de ministre d’État de Monaco, seulement quelques semaines après sa nomination par le prince Albert II le 4 juin dernier. Cette décision, survenue quelques jours avant sa prise de fonction prévue le 4 juillet, a surpris les observateurs de la vie politique monégasque.

Dans un communiqué publié sur LinkedIn, le magistrat et directeur juridique de la SNCF a expliqué sa décision en évoquant « des forces négatives et contraires d’ores et déjà à l’œuvre pour faire perdurer les pratiques archaïques du passé ». M. Mettoux a précisé qu’il ne disposerait pas « des leviers indispensables pour écrire la nouvelle page » souhaitée par le Souverain.

Les consultations avec Paris

Selon plusieurs sources concordantes, dont Le Parisien et La Lettre, l’Élysée aurait exprimé des réserves concernant la candidature de Philippe Mettoux après un examen approfondi de son dossier. Ces préoccupations porteraient notamment sur d’éventuels conflits d’intérêts liés à ses activités privées à la SNCF et à des questions fiscales.

Dans le cadre des relations traditionnelles entre la France et Monaco, Paris dispose historiquement d’un droit de regard sur la nomination du ministre d’État. Depuis 1918, ce poste est généralement confié à un haut fonctionnaire français, souvent un préfet ou un ambassadeur. Les sources françaises indiquent que l’Élysée aurait préféré orienter le choix vers un profil différent, vraisemblablement celui d’un préfet sans activités dans le secteur privé, comme Christophe Mirmand, actuel préfet de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Un profil pourtant solide

Philippe Mettoux présentait un curriculum vitae impressionnant pour diriger l’exécutif monégasque. Conseiller d’État, magistrat de formation et membre du Conseil d’État français, il avait été choisi par le prince Albert II pour succéder à Didier Guillaume, décédé en janvier 2025. Sa nomination avait été initialement bien accueillie dans les milieux institutionnels.

La nomination de Didier Guillaume en septembre 2024 avait d’ailleurs marqué une certaine évolution dans ces pratiques, l’ancien ministre socialiste n’ayant pas été directement proposé par le président français, selon BFM TV Côte d’Azur.

Un contexte institutionnel tendu

Cette affaire s’inscrit dans une période particulièrement délicate pour la Principauté. Monaco fait face actuellement aux retombées des « Dossiers du Rocher », qui ont émergé en 2021 avec la publication de documents concernant l’entourage princier.

Cette affaire implique plusieurs personnalités proches du prince Albert II, surnommées le « club des quatre » : Didier Linotte (ancien président du tribunal suprême), Thierry Lacoste, Claude Palmero et Laurent Anselmi. Le 25 juin 2025, Didier Linotte a été inculpé pour corruption, trafic d’influence et prise illégale d’intérêt, rappelle Le Dauphiné Libéré. Ces développements judiciaires créent un climat d’instabilité que la nomination d’un nouveau ministre d’État devait contribuer à apaiser.

Par ailleurs, Monaco fait face à des pressions internationales croissantes, étant récemment placé sur des listes grises ou noires européennes concernant la lutte contre le blanchiment, selon APAR TV.

Les enjeux diplomatiques

Cette situation révèle la complexité des équilibres entre l’autonomie monégasque et les relations avec la France. Si le choix du ministre d’État relève formellement du prince Albert II, les consultations avec Paris demeurent une réalité des relations bilatérales.

Le retrait de Philippe Mettoux, présenté officiellement comme volontaire, illustre les contraintes auxquelles peut faire face la Principauté dans ses choix de gouvernance, particulièrement en période de tensions.

En attendant une nouvelle nomination, Isabelle Berro-Amadeï, ministre des Relations extérieures et de la Coopération, continue d’assurer l’intérim du gouvernement monégasque, fonction qu’elle occupe depuis le décès de Didier Guillaume.

Vers une nouvelle nomination

Le gouvernement princier devra désormais identifier un nouveau candidat au poste de ministre d’État. Cette nomination devra concilier les aspirations monégasques d’autonomie avec les exigences diplomatiques françaises. Cet épisode met en lumière les défis contemporains de Monaco dans la gestion de ses relations avec ses partenaires internationaux tout en préservant sa souveraineté dans le choix de ses dirigeants.

Photo : Ministère d’Etat (Archives)

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